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Ariane Mnouchkine :

 

 

TRIBUNE — Ariane Mnouchkine, metteuse en scène et directrice du Théâtre du Soleil, appelle nos dirigeants à infliger des sanctions écrasantes contre la Russie, après l’invasion de l’Ukraine. Quitte à devoir payer plus cher le gaz, le pain, l’essence…

« Nous, les artistes, on nous somme déjà de manifester notre solidarité vis-à-vis des artistes ukrainiens bombardés d’une part, et les artistes russes, qui sont sommés, eux, de ne rien manifester du tout, sous peine de se retrouver accusés de trahison et jetés dans les geôles paranoïaques d’un gangster tout-puissant.

Nous devrions écrire des pétitions, des protestations. Nous devrions défiler avec des pancartes jetant l’opprobre sur nos dirigeants trop timorés pour les sommer à leur tour de prendre leurs responsabilités et de trouver des sanctions qui, en quelques mois, écraseraient l’économie russe... sans, surtout, ébranler la nôtre. Sans surtout nous demander aucun sacrifice. Ni sur l’essence, ni sur le pain, ni sur le gaz. Bref, on nous demande une solidarité posturale. On nous demande du vent.

Que nous ne voulions pas mourir pour Kiev, soit, mais, pour Kiev, nous les artistes, accepterons-nous au moins de nous geler les fesses ? Dans nos théâtres, accepterons-nous de distribuer des couvertures au public et de ne pas chauffer la salle ? Et pour exempter de ces sacrifices les plus démunis des Français, ceux qui n’ont d’autres solutions que d’utiliser leur voiture ou ceux qui, pour nous nourrir, doivent utiliser des engins agricoles, accepterons-nous, oui, je vais jusque-là, accepterons-nous les tickets de rationnement d’une essence à un prix raisonnable ? Et pour nos trajets paresseux ou nos promenades, accepterons-nous de payer le litre au prix d’un bon bordeaux ? Ou, mieux encore, nous, les citadins, accepterons-nous de ne pas rouler du tout ?

Idem pour le pain, les pâtes, etc. Il nous faudra des tarifs différents, selon les ressources. Ce sera ça, au moins, la solidarité avec les artistes ukrainiens. Elle commence par la solidarité, ici, chez nous, entre nous. Il s’agit de cela. C’est une guerre nouvelle. Les démocraties retiennent leurs fusils. Leurs ennemis déchaînent les leurs. Il nous faut de nouvelles armes. Tout comme les anciennes, elles coûtent très cher. ll va falloir les payer ou nous taire. »

Andreï Kourkov, écrivain ukrainien : “C’est le retour des bolcheviks”

Ariane Mnouchkine

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