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Vladimir Soloviev, "le plus célèbre des propagandistes" du Kremlin

Par Nicolas HASSON-FAURÉ

Le journaliste russe Vladimir Soloviev est visé par des sanctions de l’Union européenne, prises

en réaction à l’invasion de l’Ukraine. Conséquence de ces mesures, ce propagandiste du Kremlin

ne peut plus se rendre dans les propriétés qu’il possède en Italie. Ce dont il s’est plaint à la

télévision, vendredi 25 février 2022.

 

« On m’avait dit que l’Europe était une forteresse du droit, que tout y était permis… »

Sur le plateau d’une émission qu’il présente à la télévision russe, le journaliste Vladimir Soloviev

est énervé. Avec des gestes du bras, il évoque les villas qu’il possède en Italie, vendredi

25 février 2022 dans des propos traduits par le média américain The Daily Beast.

Vladimir Soloviev ne peut plus se rendre dans la péninsule, en raison des sanctions prises par l’Union européenne à la suite de l’invasion de l’Ukraine : nommément visé par ces restrictions, il est « le plus célèbre des propagandistes » du Kremlin, nous explique Françoise Thom, historienne, maîtresse de conférences émérite à Sorbonne Université et autrice de plusieurs ouvrages sur la Russie et le poutinisme.

Des émissions de télévision pour « mettre en musique la propagande du Kremlin »

Mercredi 23 février, Vladimir Soloviev a été ajouté à une liste de personnes visées par « des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine », indique le Conseil de l’Union européenne. Comme les nombreuses autres personnes et entités qui subissent ces mesures, il fait l’objet « d’un gel des avoirs et d’une interdiction d’entrer sur le territoire de l’Union européenne ».

Celui qui présente des émissions sur les chaînes de télévision Rossiya 1 et Rossiya 24 « est connu pour son attitude extrêmement hostile à l’égard de l’Ukraine et pour son éloge du gouvernement russe », note le Conseil de l’Union européenne. « Il est donc responsable de soutenir des actions ou des politiques compromettant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine », lit-on encore dans le document qui le sanctionne.

Vladimir Soloviev n’est pas le seul journaliste du genre à officier à la télévision russe : parmi eux, il y a notamment un autre présentateur, Dmitri Kisselev. Et dans leurs émissions, tous deux « mettent en musique la propagande du Kremlin », résume Françoise Thom.

Les programmes qu’ils présentent sont très particuliers : « Ce sont des émissions tellement agressives, tellement haineuses, nous n’avons aucune idée de ce que cela peut être, en Occident », poursuit Françoise Thom, qui a décrit une récente émission de Vladimir Soloviev dans un article publié sur le site web Desk Russie.

Depuis des années, dans ces émissions, « ce sont toujours les mêmes thèmes : les fascistes ukrainiens, à une certaine époque cela a été les Tchétchènes, les Baltes, les Géorgiens… Un peuple est toujours démonisé, avec parfois des appels au génocide », ajoute-t-elle. Des émissions et des propagandistes « toxiques, qui irradient la haine », et ont beaucoup de répercussions.

Des dirigeants « prisonniers de cette propagande »

« Il faut bien comprendre que Vladimir Poutine ne s’informe pas sur internet, il n’utilise pas les réseaux sociaux. Il s’informe uniquement par les rapports des services secrets et ces émissions de télévision », poursuit Françoise Thom.

Résultat, toujours selon elle, lui et les dirigeants russes « sont prisonniers de cette propagande » à laquelle ils ont fini par croire. Celle-ci décrit un véritable « monde parallèle », présentant par exemple « les Ukrainiens comme un peuple frère dominé par une petite poignée de nazis installés au pouvoir par l’Occident ».

Conséquence, toujours selon Françoise Thom, le président russe « était persuadé qu’à l’arrivée de l’armée russe, la population [ukrainienne] allait se soulever ». Une erreur : les Ukrainiens luttent contre l’armée russe avec vigueur depuis plusieurs jours.

Et la population russe, comment voit-elle ces émissions ? Françoise Thom évoque des sondages, effectués régulièrement par la radio américaine Radio Free Europe/Radio Liberty dans les rues de Moscou. Il en ressort « qu’une bonne partie des gens [interrogés], dans l’absolu, y croit ».

Ces propagandistes, eux, sont « d’un cynisme absolu », souligne-t-elle. Ainsi, à l’époque de Boris Eltsine (président de la Fédération de Russie de 1991 à 1999), Vladimir Soloviev était « plutôt libéral ». Quelque temps après l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, il « s’est adapté » et a radicalement changé de discours.

Il tient aujourd’hui des propos particulièrement virulents contre l’Europe et l’Occident… ce qui ne l’a pas empêché d’acquérir deux propriétés en Italie, comme l’avait révélé l’opposant russe Alexeï Navalny en 2019. Dont l’une située dans la région du lac de Côme, dans le nord de la péninsule.

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