MEDIA CORSICA
Marie-Agnès Artaud
Vit à Limoges, Thérapeute sociale.
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Charles Rojzman
Mouvements citoyens, initiatives novatrices : Comment les aider à réussir ?
Pour illustrer mon propos, je reviendrais sur le phénomène « Nuit Debout ».
Au tout début, ce mouvement a enthousiasmé nombre de personnes déçues par ce qu’on qualifie aujourd’hui de « politique », où le souci du bien commun… semble parfois le dernier des soucis de nos dirigeants ! Emergeait un formidable espoir de sortir de l’immobilisme, voire de la sidération tant déplorés aujourd’hui, d’inventer une manière différente, novatrice de faire de la politique, d’occuper l’espace public, de s’y livrer à de libres débats, potentiellement riches de réalisations concrètes, d’être les acteurs d’un grand changement. Tous ces jeunes et ces moins jeunes, qui sortaient de chez eux et de leurs habitudes, allaient enfin pouvoir prendre leur destin en main, s’élever contre les injustices, réinventer le monde, des nuits durant, assis en rond sur les places publiques ; ils allaient occuper, réoccuper un espace public déserté, suivant l’exemple de l’Espagne, de la Grèce, de l’Island. Tout semblait possible; un monde nouveau allait advenir. Mais l’ancien a bien vite rattrapé les acteurs, pourtant bien décidés à créer du nouveau, de ce mouvement. Des ennemis ont surgi : le pouvoir en place envoyant les forces de l’ordre, les casseurs… et le plus puissant, le plus sûrement destructeur : celui venu de l’intérieur. . Passés les premiers moments d’euphorie, il a bien fallu se rendre à l’évidence : les monstres anciens ont refait surface , les vieux briscards de la politique , du syndicalisme ont tenté de récupérer le mouvement , imposant leurs vieux schémas dépassés grâce à des techniques de manipulation bien rodées On a vu surgir des violences, des personnes insultées, rejetées, des dissensions de plus en plus criantes , beaucoup ont alors quitté les lieux et le mouvement a périclité .
Pourtant, beaucoup de ces personnes étaient enthousiastes et volontaires au départ, sincèrement heureuses de se retrouver, de discuter ensemble, portées par un espoir sans doute immense.
Mais il arrive un moment où inventer du nouveau est trop vertigineux et qu'on ne sait pas tout simplement pas comment faire.
Débattre démocratiquement, écouter la parole de l’autre, faire entendre la sienne sans l'imposer par la violence, coopérer et travailler ensemble, n’est pas inné. Et tout cela, nous ne l’avons pas (ou bien rarement) appris à l’école ou dans notre parcours de vie.
Beaucoup d’initiatives collectives, associatives, novatrices, voient le jour et fonctionnent un temps plus ou moins long, portées par l’enthousiasme des débuts ; mais très vite des obstacles émotionnels surgissent : les peurs, les blessures du passé sont réactivées par les agissements des autres et l’unique réponse connue est le déchaînement de violences envers celui ou ceux qui ne partagent pas exactement nos positions.
La Thérapie Sociale représente une aide précieuse pour aider les personnes à se faire entendre, à être les acteurs de leur vie, de leur avenir et à les aider à faire évoluer les mouvements collectifs d’une manière constructive et créative. Elle nous aide à dépasser nos peurs d’être jugés, méprisés, rejetés par les autres au sein d’un groupe. Elle permet d’entrer dans une relation vraie, sincère, vivante avec nos concitoyens. Et lorsque la confiance en soi et en les autres a été restaurée, la confrontation réelle des points de vue et des visions différents peut se faire, dans le respect de la dignité et de l’intégrité de tous les participants. Une coopération véritable avec les autres devient possible et permet de faire émerger de belles idées, de leur donner vie et de les faire durer et évoluer positivement.