MEDIA CORSICA
Docteur Edmond Simeoni
Militant de la Corse
Ses articles :
Corse : la résilience en marche
Corse : 4 statuts de couche culotte
Corsica : les bourgeons de vie
Corse : les chantiers de l'espoir
Corse : la résilience en marche
France : le régime présidentiel
Appel aux Corses
U Cutrastu du 12/11, a montré que ma préoccupation d’un « front républicain » était fondée : l’ambition de Macron et de ses partisans locauxest de créer un « rassemblement républicain » en Corse, avec la participation supplémentaire de celles et ceux qui déclinent le même dénominateur commun « tout sauf les nationalistes ». Attitude dangereuse, radicale qui réensemence les antagonismes très conflictuels. Il ne faut pas tomber dans ce piège.
Réponse à Jean-Martin Mondoloni
J’ai dit depuis des années, en quelle estime je vous tenais sur le plan professionnel et, en dépit de nos orientations différentes sur la Corse, je ne vous tenais pas pour responsable des errements politiques de l’Etat en Corse qui, ligués de manière séculaire, ici et à Paris, -droite et gauche confondues -ont ruiné l’île, la démocratie, son identité, son développement. La démonstration a été amplement faite depuis 50 ans ; elle sera rééditée sous peu de manière publique ; je pense qu’elle est irréfutable et qu’elle permettra le débat, serein et argumenté.
La droite et la gauche sont au pouvoir en France et en Corse depuis deux cents ans ; nous n’avons pour l’heure que des parcelles de ce même pouvoir depuis deux ans.
L’opinion publique en Corse, en France continentale -ici et dans la diaspora-, et dans l’Union européenne appréciera et, in fine, les électeurs jugeront.
Je veux répondre brièvement à votre texte :
• La Corse a connu des dynasties politiques, évidentes. Suggérer que les Simeoni en font partie est un exercice scabreux, voué à l’échec. Je vous rappelle que, avec des milliers de militants et de sympathisants, nous nous battons depuis 1960 contre l’Etat et contre le clan. Avec clarté dans le choix des moyens, démocratiques, et dans les objectifs : Autonomie interne dans le cadre de la République Française et de l’Union Européenne. Aléria est le seul moment où j’ai pratiqué la violence. La situation était intolérable. J’ai toujours dit mon respect pour les victimes et ma compassion pour les familles. C’était indispensable et mon devoir vis à vis de la Corse me l’a imposé.
Dans les années 70, je me suis présenté, avec mon frère Max, à 2 élections cantonales en Haute Corse; nous étions les deux seuls candidats autonomistes dans l'île ; nous avons eu respectivement 1 et 2 suffrages ! Singulier viatique pour introniser une dynastie, dans une Corse insultée et ridiculisée par le mépris du suffrage universel, mépris que nous avons été les seuls à combattre. On peut y ajouter que Max et moi-même, avons connu la prison, la répression et que jamais nous n’avons dérogé, comme médecins aux règles de la déontologie et comme militants aux règles impérieuses de la démocratie et de l’humanisme.
Gilles Simeoni, mon fils, est un militant depuis 20 ans et il a accédé à la responsabilité du Conseil Exécutif depuis 2 ans ; et il n’a trouvé, dès le départ ni fonds de commerce politique, ni legs politiciens, ni stocks de suffrages – bien souvent frelatés- , ni soutiens ou comportements douteux, ni réseaux clientélaires pour tracer son chemin, toujours avec le souci de respecter les fondamentaux éthiques et politiques de notre engagement familial.
• Chacun sait que j’ai choisi, depuis 1976 -date de création du FLNC- un cheminement différent de celui des nationalistes indépendantistes, tant au point de vue des objectifs que des moyens utilisés. Je me suis employé avec d’autres mais en vain et à prévenir les terribles affrontements fratricides et ensuite à ensemencer la réconciliation ; j’ai toujours désapprouvé les dérives et j’ai même démissionné de l’Assemblée de Corse pour incompatibilité avec la ligne et les actes des militants radicaux clandestins. Depuis 1990, j’ai mené, à quatre reprises, une action incessante pour faire arrêter définitivement la violence clandestine. Mon échec, malgré les promesses qui n’ont pas été tenues et m’ont valu des reproches, m’a conduit à une attitude distancée. Et plus prudente.
• Corsica Libera n’a pas fait partie de la nouvelle coalition municipale de Bastia, en 2014, tout simplement parce que le FLNC continuait à pratiquer la violence. La coalition a seule permis, sur une base publique claire, de soustraire la ville de Bastia, tellement en retard, à la tutelle ininterrompue d’un clanisme de gauche depuis 50 ans. Ce fut la seconde brèche- après Calvi et dans les années 1970- contre l’association néfaste entre l’Etat et le clan. Je m’en félicite et la brèche s’est par la suite élargie à telle enseigne que, aujourd’hui, nous avons gagné la bataille des idées, en matière de terre, d’identité, d’environnement, d’initiatives….. Presque toutes les listes aux prochaines élections se réclament de l’autonomie et la vôtre du régionalisme.
• Je vous rappelle que le FLNC a renoncé définitivement à la violence, le 25 juin 2014, et que cela a permis notamment la paix et création d’un axe stratégique majeur, déjà souvent largement validé par les urnes (CTC en 2015 et 3 élections législatives sur 4 en 2017). Le bilan de la très courte mandature de 2 ans, à la CTC, est déjà éloquent surtout si on le compare à l’immobilisme des décennies précédentes.
Cette union, sur la base de la démocratie, s’est faite dans la transparence et il existe déjà des résultats tangibles. Nos partenaires sont partisans de l’indépendance. Ils en ont parfaitement le droit du moment que leur combat s’exerce de manière exclusivement démocratique et pacifique. Je voudrais vous rappeler que le peuple corse choisira, in fine, son destin dans les urnes. C’est une garantie majeure, de droit universel, sécurisante et rassurante.
• Vous me taxez de manichéisme qui est toujours le fruit du sectarisme ; je suis surpris quand j’examine mon long parcours de lutte, mes appels constants au dialogue et à la coopération entre des opinions politiques différentes ; sans oublier mon autocritique en 1987, (j’attends toujours celle de l’Etat et du clan) et la création fréquente de collectifs,- où cohabitent des gens de différentes tendances- ou encore la politique de la main tendue, toujours refusée. J’ai participé à la création du Collectif antiraciste « Ava basta » et suis totalement partie prenante de la croisade de « Umani » contre la violence.
Je rends fréquemment hommage à de nombreux élus de droite, de gauche, du centre -et j’ai très souvent travaillé avec eux- et je suis un défenseur de la tolérance donc un adversaire du sectarisme.
Il devrait être possible, dans le souci de servir la Corse et son Peuple, de trouver, le moment venu et après les élections, indépendamment de leurs résultats, des passerelles et de créer des synergies. Et surtout d’instaurer la confiance, entre nous mais tellement ébréchée avec la France, comme l’a reconnu Manuel Valls lors d’un voyage en Corse.
Si nous avons comme priorité commune exclusive d’installer la démocratie dans l’île, de préserver notre identité et notre terre, d’impulser le développement concerté, plus réfléchi, plus juste, de s’ouvrir modestement au monde, je ne doute pas que vous serez présent et actif avec vos amis - gagnants ou perdants - pour cet immense challenge, par un dialogue élargi qui est la seule issue, démocratique et apaisée, à un conflit , très dur, trop long ; avec la garantie du respect des intérêts légitimes de toutes les parties.
A chacun sa vérité.
Avec mes sentiments cordiaux.
Dr Edmond Simeoni
10 novembre 2017